Le mois de tous les possibles

Depuis 2007 et pour différentes raisons plus ou moins évidentes, plus ou moins partagées, Novembre est le mois de l’année que je préfère. Ca n’a pas toujours été le cas, et ça n’en fait pas toujours forcément un mois facile, 30 jours de bonheur ininterrompu. Mais j’ai la garantie d’y trouver quelques jours apportant leurs raisons de célébrer, d’être heureuse. Je dis « jours », mais c’est plus ou moins un abus de langage. Je dois ces petits bonheurs de novembre à des gens, réels ou imaginés, intérieurs ou extérieurs à moi, et à ceux de chair et d’os lisant ce blog, j’envoie un bisou enneigé.

La principale qualité de Novembre, depuis 2007 en ce qui me concerne, est d’être « le mois de l’écriture ». Pas dans le sens où je n’ouvre pas word les 11 autres, mais celui-ci a une texture particulière, me transmet une énergie qui semble rendre tout possible. Et cette année, ma foi…

Novembre 2012 – Bilan écriture :

- Les 52 000 premiers mots d’un nouveau roman, né dans ma tête quelques jours avant le 1er novembre
- Un petit texte improvisé lui aussi, pour un tout nouveau projet dont je reparlerai peut-être ici
- Une lettre de présentation pour un certain roman avec « Novembre » dans le titre – sans doute le plus difficile des exercices d’écriture (dont je ne serai pas venue  à bout sans mon agent que je remercie ici <3) (roman déposé vendredi chez un premier éditeur, au passage. Histoire de l’avoir fait en ce mois magique)
- Une critique ciné sur l’Etagère
- Trois exercices éditoriaux différents pour un processus de recrutement
- Une lettre de démission… déposée elle aussi
- Un mot de remerciement à l’auteur de la Promesse d’Embauche reçue 12 heures *après* la démission

Le plus étrange c’est que j’ai l’impression d’en oublier… Peut-être parce que dans ma tête, je ne sais pas détacher aussi bien qu’ici ce « bilan écriture » du reste, du « bilan de vie » entre le 1er et 30 novembre. Qui intègre aussi 8km de nagés sur 2 semaines (avant 2 semaines d’antibiotiques), 3 romans lus (un 4ème dévoré) une dizaine de films, et certains aspects de l’existence peut-être bien plus délicieux encore que tout cela réuni.
Et que je garderai égoïstement pour moi.

J’ai bien conscience que la magie de Novembre n’est pas universelle, ne peut marcher pour tout le monde… pas plus que celle du mois qui suit. Comme tous les ans en décembre, j’ai mis de la neige sur cette page, sensible aux lumières, aux couleurs et surtout à l’idée de l’hiver (Winter Wonderland) en sachant que certains resteront impénétrables aux guirlandes clignotantes et aux christmas carols. Ca n’est pas grave.
Parce que l’autre chose dont j’ai conscience, c’est qu’on bricole sa propre magie. Trouvez ce qui marche pour vous, n’écoutez pas les cyniques. Lancez vos propres sorts, faites de tous les mois les mois de tous les possibles.

(Mais pensez à dormir un peu entre deux)

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Au bord

Je commence cette note à la suite des premières lignes de ma note d’intention aux éditeurs, qui je le sens, va me prendre plus de temps à la rédaction que les 180 000 mots du roman qu’elle est censée présenter. Il n’y a pas de mot pour décrire à quel point je n’aime pas l’exercice… En vérité il y en a sans doute un ou deux mais si je les trouvais ça rendrait ma phobie de la chose plus concrète, moins mystique, et du coup ça m’obligerait à m’y remettre.

Du coup j’ai préféré ouvrir le tableau déjà bor-dé-lique rassemblant mes notes éparses sur mon nouveau projet. Quand il m’est apparut évident que le narrateur porterait le nom d’une personne pour qui je nourris affection et admiration (et pas juste parce qu’elle est censée être ma jumelle ; ) je suis allée lui dire. Une demi-heure plus tard, notre conversation est tombée de charybde en scylla vers la folie nécessaire, la folie douce (ou pas) qui met de la couleur dans le quotidien. Rapport au fait que folle est un adjectif qui revient un peu trop souvent à mon goût dans la bouche des gens tentant de me décrire.

Donc nous voilà à essayer de nous remémorer les choses les plus folles qu’on ait pu faire. Pour sa part elle s’est mariée, et c’est vrai que quand on connaît mes plans pour la chose, ça parait assez dingue (moins quand on connaît sa moitié, mais je vais rien dire ; ) moi, je raconte comment j’ai tourné le dos à mon vertige et abandonné mon sac au sol pour avancer sur une corniche large comme mon envie de me marier et arriver tout au bord d’une falaise Irlandaise… Ville que ma jumelle avait visité suite à sa folie personnelle (son mariage, vous suivez ?) et où elle avait elle-même promené ses ballerines le long des falaises, convaincue par le fourbe de mari. Hey, mais moi aussi, on avait dû sacrément me convaincre pour que je finisse par y aller… Soyons clairs, sans ma meilleure amie qui gambadait tranquillement au dessus du vide, je n’aurais jamais… Mince ! Je n’aurais sans doute même pas pris l’avion pour aller en Irlande en premier lieu. Du coup est-ce que ça compte ?

Me reviens alors un truc plus fou encore sans doute, quelque chose qui remonte à plus loin, à mes seize ans, à mes années lycées qui (à l’inverse du reste de l’univers), furent parmi mes meilleures. Dix ans plus tard, je me demande, serais-je capable de refaire ce que j’ai osé cette année là ?

De manière générale, il m’arrive de réaliser que mon rapport à la vie a parfois changé à mon insu, mais je n’arrive pas toujours à déterminer dans quel sens. Ce que je sais, c’est où, quand, pourquoi. C’est facile : c’est quand je suis tombée malade. Non, même pas. C’est après. Quand j’ai été « guérie », que l’horizon s’est rouvert. Un temps je pense que je m’en suis sentie… immortelle. Ou plutôt invulnérable : capable de tout faire. Merde, ça semblait logique non ?

Aujourd’hui je me sens plutôt effrayée. Prudente. Me disant que j’ai eu ma dose de chance et qu’il faudrait commencer à faire gaffe, histoire de ne pas gâcher ce temps en m’achevant prématurément. La bonne nouvelle, c’est que parce que je suis folle, demain, cette tendance se sera sans doute inversée. Au fond je pense que les deux versions co-existent, une Jade qui veut tout voir et tout faire et une autre qui se dit que si elle veut écrire tous les bouquins qu’elle a en tête, il s’agirait de bien regarder avant de traverser.

Tout ça pour dire que dans ces moments là, je me sens, avant toute chose, vraiment chanceuse.
D’avoir une meilleure amie qui me fait aller tout au bord des falaises.

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Tout ce que j’ai du mal à dire

And in that moment, he was reminded once again why he wanted to write in the first place. It’s for the same reason anybody does anything: to impress women.

De toutes les grand(iloquente)s ou petites citations jamais produites sur l’acte d’écrire, celle-ci est toujours restée une de mes préférées, alors même que (comme pour beaucoup d’autres) je ne m’y suis pas souvent retrouvée. Mais je l’aime beaucoup, d’abord parce qu’elle est drôle, et ensuite, pour son incise presque plus que sa chute. Parce qu’elle ramène l’écriture au même rang que toute autre activité : « for the same reason anybody does anything. »

Je dis très facilement aux gens que j’écris, pour une raison toute simple : je n’ai pas plus honte que je n’en suis fière. J’écris comme d’autres font de la natation ou du maquettisme : parce que j’aime ça, parce que ça me fait du bien. J’écris donc sans finalité, tout au moins tant que je n’ai pas fini l’histoire.

Ensuite…

Ensuite j’entre en phase de deuil presque, celles où les personnages que j’ai accompagnés (ou qui m’ont accompagnée, finalement) me manquent, celle où se mélangent la satisfaction de voir son puzzle complété et le dépit de ne plus avoir de pièces éparpillées sur le bureau. Je pourrais de suite renchainer sur un nouveau roman mais il me faut un peu de temps pour décanter le précédent, passer à autre chose. Mon livre est refermé. La magie prisonnière dedans. Je dois attendre que les résidus restés dans l’air s’étiolent.

Sauf si une autre personne rouvre le livre. Le lit. Et libère sa magie. Ressuscite mes personnages, fait revivre l’histoire en la vivant lui pour la première fois. Parce qu’en fait, une fois le roman terminé, nait bel et bien une finalité qui n’existait pas avant, qui n’existait pas tant que j’écrivais.

Etre lue.

Cela ne fait pas si longtemps que je songe à tenter d’être éditée. Que je me renseigne sur ce milieu qui parait si scellé. Pourtant ce n’est pas la finalité en soit. C’est juste, à l’heure actuelle, un outil, la meilleure étape intermédiaire pour « être lue ». Pour que mes histoires ne meurent pas une fois apposé le point final.

Et je crois que je saurais pas vraiment vous expliquer mieux que ça ce que m’a fait votre cadeau d’anniversaire. A quel point l’idée m’a touchée. L’idée, la personne derrière… et toutes celles qui l’ont suivie. Ont accepté de faire quelque chose de si… (chronophage déjà !) désintéressé et conséquent. Comme c’était incroyable de découvrir réunis là des gens qui ne se ressemblaient pas, qui ne se connaissaient même pas, de si différentes facettes de ma vie fusionnées par celle que je considère comme l’une des plus importantes. Parce qu’en soit, voir rassemblés ses amis vétérans de fac, leurs familles qu’on aimerait siennes, son ex-mari, sa mère… son meilleur et plus vieil ami, plus d’une de ses auteurs favorites, son ange-gardien, le tout sous l’égide de sa meilleure… complice, … peu importe ce qu’ils disent ou écrivent. C’est déjà quelque chose d’unique et de si particulier.

Non, je ne saurais pas vous expliquer mieux de quelle façon ça a touché Julie avant même qu’elle ne démarre sa lecture, avant même de toucher Jade-l’écritvaine. De quelle façon vos mots ont rallumé plein de choses en moi. A m’en faire perdre les miens, pour tout vous dire.

C’est un ressenti fabuleux que de redécouvrir son histoire par les yeux d’autres personnes, de parler ou de voir parler de ses personnages comme d’entités réelles… tout au moins, existant au dehors de sa tête.

Partagées.

Et de réaliser que ces personnes vous connaissent si bien qu’elles y ont vu ce que vous vouliez qu’elles voient. De lire que le meilleur ami a déterré tous les clins d’œil à votre enfance commune, que votre mère a reconnu sa propre description au détour d’une phrase, votre grande copine de fac le « merci » explicite quant à un geste passé. Votre ange-gardien reconnaître une conversation que vous avez eu sur la Ville du Bonheur, et votre complice, la référence que vous faites à son propre roman, à son talent.

De réaliser qu’au fond je m’étais plantée. Malgré moi (ou non) je pensais bien à d’autres pendant l’écriture…

Depuis le début de ce texte aussi confus et sonné que je le fus agréablement pour mon anniversaire, j’essaie en fait juste de vous dire merci. A une en particulier <3, mais à tous "en particulier" aussi, pas de manière générale, tant chacun a mis... de lui. De nous, dans le lien différent et unique que j'ai avec chacun.

Merci donc. Parce qu’a priori, lorsque je me mets à écrire un livre, c’est par plaisir, égoïste.
Et que je suis bien consciente que lorsque des proches acceptent de le lire, c’est d’abord pour me faire plaisir.
Alors découvrir que ça a pu, au final, ne serait-ce qu’un tout petit peu, leur faire plaisir…
C’est le plus joli cadeau dont puisse rêver une écrit-vaine.

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Interlude

When despair for the world grows in me
and I wake in the night at the least sound
in fear of what my life and my children’s lives may be,
I go and lie down where the wood drake
rests in his beauty on the water, and the great heron feeds.
I come into the peace of wild things
who do not tax their lives with forethought
of grief. I come into the presence of still water.
And I feel above me the day-blind stars
waiting with their light. For a time
I rest in the grace of the world, and am free.

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Plus de tics, plus de tacs

Je n’y arrive pas. Ce blog je veux dire. Je n’y arrive vraiment pas, et pourtant, ce ne sont ni les sujets ni même l’envie qui me manque…

J’ai rouvert cet espace un 30 novembre, soit à la fin d’un Nanowrimo (et au début d’un nouveau roman, celui qu’à ce jour, j’aurais préféré écrire). Aujourd’hui ce roman est fini, et entre sa structure un peu compliquée, ses thématiques qui me sont très personnelles et son bon poids de 180 000 mots, il m’aura demandé beaucoup de temps. « Demandé », pas « pris », car au fond j’étais tellement contente de lui donner…

Ce roman, écrire de manière générale, est une des choses qui m’a le plus aidée à tenir, depuis ce 30 novembre. Car dans cette même période, si mon roman prenait en volume, en solidité, en force, mes conditions de travail perdaient en logique, en bon sens, et surtout en humanité, au point qu’aujourd’hui mon médecin traitant me met très sérieusement en garde contre une possible dépression.

Je ne la vois pas venir car je parviens toujours, au sortir du bureau, à faire abstraction. A fermer le dossier « travail » jusqu’au lendemain, 9h, quand je pénètre à nouveau cet open space infernal. Au lever du lit, je bouquine, je regarde un épisode, sur le trajet me menant au boulot, j’écoute de la musique, des audiobooks, je réfléchis à un prochain projet : ce temps là m’appartient.

C’est aussi comme ça que je tiens : je me dis que si à l’inverse de mes collègues, je refuse de « renoncer » à ma 5ème semaine de vacances et je prends mal l’idée de travailler 21 jours consécutifs (sans être payée un cent d’heure sup mais la question n’est même pas là) c’est parce qu’être là bas me vole du temps pour autre chose.
Si ça ne leur pose pas de problème à eux, c’est qu’on ne leur vole rien. Que le boulot, c’est la grande composante de leur vie. Pour moi, c’est juste celle qui, par le salaire, soutient toutes les autres. L’écriture les amis les petites amies les voyages les visites de musée. C’est la composante qui me permet matériellement d’inviter des copines au restaurant, de faire les cadeaux d’anniversaire que je veux de ne pas (trop) hésiter quand un livre me fait de l’œil ou d’aller assister au mariage de ma presque jumelle en Suisse.

Du coup oui, quand bien même cet emploi m’aliène, l’idée de m’en défaire sans un autre en vue me fait un peu peur, je dois bien le reconnaitre. Alors j’essaie de garder un équilibre.
Ce qui me terrifiait le plus à l’origine, c’était de me faire par trop voler mon temps. De ne plus être capable d’écrire, de devoir sacrifier ces autres composantes qui sont ce pour quoi je travaille.

Et un an et demi plus tard, je finis toujours le nano, ponds toujours bon an mal an mon roman annuel. Ai une vie sociale des plus riches, entre les amis, les sorties, je voyage ça et là, vais au cinéma et au théâtre, lis toujours, fais même occasionnellement du sport. Pourtant les sacrifices existent, juste plus discrets, et surtout… acceptables. Un bon compromis de la vie d’adulte. Je ne lis plus qu’un livre par semaine, soit 2 à 3 fois moins qu’avant. Je vois toujours Untel mais « plutôt dans une quinzaine de jours, s’il te plait ». Je regarde un film en deux fois car la fatigue morale et physique rend l’écran agressif à mes yeux. Et j’écris toujours…

mais plus ce blog. Il fait partie des sacrifices.

Sauf que je n’ai pas envie de le ranger dans les « acceptables ».

Du coup, en bon être contradictoire et pourtant cohérent, je m’engage ici à revenir sous peu… avec un article expliquant pourquoi les blogs me manquent.
Pourquoi vous me manquez.

Écrire de la sorte, dans ces espaces étranges sur internet, m’a toujours beaucoup apporté. A commencez par vous les gens, les amis lecteurs de cette page que j’ai connus ici. Et je vous veux dans ma vie d’adulte autant que dans ma vie d’écrit-vaine.

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